Transitive Track #6 – Utopie concrète
UTOPIE CONCRÈTE. Oxymore que l’on doit à Ernst Bloch, philosophe de l’espérance du début du XXe siècle.
EN GROS, c’est une utopie qui a le sens du réalisme, car elle ne se contente pas de faire rêver, elle vise à faire des rêves, une réalité.
Prenant l’oxymore au pied de la lettre, de plus en plus de citoyens expérimentent leur rêve d’une transition écologique et sociale : jardins partagés, tiers-lieux, ZAD, circuits-courts, mais aussi cuisine à l’énergie solaire, fastfood solidaire, ligne ferroviaire citoyenne et tellement d’autres.
AINSI, ses utopistes du réel refusent l’assignation de l’humanité à son seul désir de jouissance, contestent la fatalité d’un système forcément inégalitaire et contournent l’inertie et l’autorité des institutions. « Soyons le changement que nous voulons voir dans le monde » aiment-ils dire à qui veut l’entendre.
MAIS, n’est-ce pas un peu présomptueux de penser que si nous changeons, les autres suivront ? Et peut-on vraiment inverser le cours funeste du monde en semant des graines de ficus dans les rues de sa ville ou en ramassant des déchets plastiques sur les plages pour en faire des bracelets ? A croire qu’ils construisent un autre monde quelques jours par mois pour ne pas trop culpabiliser pendant les soldes…
CERTES, ces minorités actives n’échappent sans doute pas complètement aux démons consuméristes de notre époque, mais au moins tentent-ils d’ouvrir des brèches, un peu comme les termites qui creusent leurs petits sillons à l‘abri des regards jusqu’à ce qu’un jour, sans crier gare, la maison s’effondre sur elle-même.
ALORS FINALEMENT qu’est-ce qui est le plus sensé : réaliser une utopie, qui par définition ne sera jamais à la hauteur de ses espérances, ou bien se complaire dans l’impuissance pour s’épargner toute déception ?
Générique du Grossaire
Écriture : Chrystèle Bazin
Voix-off : Maëlle Legeard
Montage : Chrystèle Bazin
Production : Transitive, 2021