Et s’il n’y avait qu’une lettre pour passer de solitaire à solidaire ?
Alors que les citoyens ne croyaient plus au pouvoir du vote, l’élection de Donald Trump est venue leur prouver le contraire. Cependant au lieu du triomphe annoncé des sans grades sur l’establishment, ne s’agirait-il pas plutôt d’une victoire des individus connectés sur les corps sociaux ? Les réseaux sociaux sont en effet devenus l’une des portes d’entrée principales sur le monde, atteignant directement les individus et court-circuitant les corps sociaux traditionnels que sont la famille, l’école, le travail, etc. Contribuent-ils, dès lors, à façonner l’opinion, à l’image de la télévision quand elle sélectionne les informations et décide de leur traitement ?
Première observation : les algorithmes des réseaux sociaux, cela a été maintes fois décrit par les sociologues, tendent à nous donner à voir et à entendre ce que nous pensons déjà. Cette homophilie de la pensée, en renforçant nos convictions et notre aveuglement à l’autre, celui qui ne pense pas pareil, contribue à la disparition des espaces de dialogue et des zones d’incertitude. C’est peut-être ainsi que les élites, les privilégiés ou juste ceux qui « s’en sortent » deviennent aveugles aux inégalités sociales dont les effets aspirent la société vers le chaos. C’est peut-être ainsi que les classes moyennes populaires, les sans diplômes ou juste ceux qui ne s’en sortent pas ou de moins en moins, deviennent aveugles face aux mensonges les plus irresponsables des populistes…
Pourtant, depuis internet, nous avons acquis une mémoire collective sans précédent. Lorsque les dirigeants politiques s’expriment, il est, en effet, courant de voir surgir une vieille vidéo ou un vieux tweet qui vient attester de leur revirement soudain ou de leur double discours. Dans la majorité des cas, ces révélations font pschitt. Parce qu’elles viennent fragiliser nos convictions, nous préférons sans doute les écarter, arguant de la théorie du complot, de l’attaque politique ou de la fausse rumeur.
Il y a, cependant, une autre raison qui nous pousse à l’oubli : sur les réseaux sociaux, une révélation est vite remplacée par une autre. Ce qui nous amène à une autre observation : les corrélations faites entre la radicalisation des jeunes et les réseaux sociaux, si elles ne sont pas fondées, soulèvent le problème du harcèlement continu des notifications. Même s’il est automatique et sans but idéologique, ce harcèlement est en effet largement utilisé par les djihadistes, afin de soumettre les jeunes à un flux continu de publications et de conversations similaires qui ne laisse aucune place à la réflexion. Notre mémoire immédiate, celle qui nous sert justement à réfléchir, pourrait-elle un jour ne plus rien fixer tant elle se vide au fur et à mesure qu’elle se remplit ?
Une étude (Trending Machine, 2013) a révélé que… (lire la suite sur le Digital Society Forum)