Toi aussi print ta robe !
Vendredi dernier j’arpentais le Carrousel du Louvre entourée d’une batterie d’imprimantes toutes plus cubiques les unes que les autres.
Toute la journée elles ont imprimé sans relâche des vases, des vases, des vases. J’exagère très légèrement, il y avait aussi des nains de jardin.
En fait j’étais au 3D Print Show et on peut dire qu’ils ont vraiment cherché à faire le show. Ils le font un peu partout dans le monde : London (oui pas Londres, London), New York, Dubaï, Singapore. Mais qui se cachent derrière « ils » ? Quelques recherches Google plus tard – car il n’y a pas d’information à ce sujet sur leur site – c’est une agence londonienne Team Awesome, avec un nom pareil, on comprend mieux le côté « show off ». C’est aussi l’agence qui organise les conférences TED à Londres. Ils ont donc lancé la première édition parisienne de leur 3D Print Show, le 15 et 16 novembre avec un slogan carrément gonflé : « Internet a changé le monde dans les années 1990. Le monde s’apprête à changer encore« . Avec l’impression 3D donc (ou additive manufacturing).
Le ton est donné. Mais si Chris Anderson, le rédacteur en chef de Wired a raison (voir son livre « Makers, la nouvelle révolution industrielle ») et que le développement de l’impression 3D sonne le glas de l’industrie – c’est à dire la production en série de biens, on a de quoi avoir des sueurs froides ou au contraire nager en pleine euphorie ou les deux.
Après la numérisation de la musique, des livres… ce sont potentiellement tous les objets physiques qui deviennent numériques et que l’on pourra alors reproduire à volonté sans besoin d’intermédiaire, et donc sans besoin d’usine… Fabriquer chez soi ou proche de chez soi, en fonction de ses besoins. C’est bien à tout le moins une révolution industrielle qui s’opère devant nos yeux. Alors, oui, ça mérite bien un show.
Trois cas de figures se présentent :
1- vous avez un objet modèle, vous le scannez en 3D, un logiciel de 3D s’occupe de retranscrire votre modèle en patron numérique et il ne vous reste plus qu’à imprimer votre modèle, après l’avoir éventuellement personnalisé.
2- Vous choisissez un modèle 3D existant sur une des nombreuses plateformes les référençant et vous l’imprimez.
3- Vous créez vous-même votre objet avec un logiciel 3D et vous l’imprimez.
Quand on sait que le droit nous autorise à produire pour nous-même, c’est à dire l’équivalent de la copie privée pour les produits culturels, le monde des affaires peut se mettre à trembler. Imaginez le piratage à grande échelle pour les marques comme IKEA, Disney ou même les marques de prêt-à-porter, parce que, oui, on peut aussi imprimer sa robe…
Ainsi, en déambulant dans les allées du salon, on pouvait voir se dessiner le monde qui arrive. Le plus fascinant reste le domaine médical : impression de prothèses (bras articulés), de morceaux de crânes, de tissus humain (en particulier pour tester des crèmes, des médicaments… et laisser les animaux tranquille), peut-être un jour impression d’organes… Et l’impression d’humains ? Il ne faut pas non plus prendre ses rêves ou ses cauchemars pour la réalité… L’impression 3D permet de remplacer à l’identique des éléments cassés ou déficients du corps humain et sauve des vies, c’est déjà pas mal ! Exemple plus anodin mais qui vous parlera sûrement : fini le moulage des dents avec cette pâte rose immonde, votre dentiste vous scanne la mâchoire et le prothésiste imprime votre couronne ou vos appareils dentaires…
Beaucoup plus fort, l’université de Nottingham a mis au point une nouvelle technologie d’impression le « multifunctional additive manufacturing » permettant d’imprimer de la matière et des circuits imprimés, ouvrant un champ immense, par exemple ce bras articulé truffé d’électronique :
Il y a avait aussi une voiture en état de rouler, dont l’extérieur et l’intérieur ont été fabriqués par impression 3D.
Il y avait aussi un robot imprimé en 3D pièce par pièce.
Par contre…
Il n’y avait pas d’armes.
Il n’y avait pas de food printing.
Mais…
Il y avait un fashion print show !
Et oui un défilé de mode au Carrousel du Louvre c’est logique.
Et là, on a eu le droit à la totale, le groupe de musique masqué avec solo de guitare électrique (elle a été imprimée en 3D la guitare ?), une chanteuse aux tonalités nordiques, une danseuse performeuse et bien sûr des mannequins portant des accessoires (chaussures, colliers…) et quelques vêtements imprimés en 3D, avec cerise sur le gâteau le traditionnel final de la mariée.
Voilà, c’était un petit aperçu du 3D Print Show.
Et surtout une seule chose à retenir, rappelez-vous que la photographie c’est tellement 20e siècle…